« Et rebelote ... »

Mélopée & Fleur

« Aïe ! »

Pour la énième fois de la journée, Petite Mélopée était tombée. La terre sèche avait été balayée par le vent, laissant apparaitre un petit bout de pierre. Et même si la petite n’était pas du genre à se plaindre, s’ouvrir la patte à cause d’une pierre n’était pas très agréable. Elle s’était relevée avec peine, la patte à demie repliée. Quelques gouttes de sang perlaient sur son pelage gris. Dans ses yeux dansait une étincelle de douleur et de colère. Contre elle-même ? Contre le bout de roche ? Aucune idée.

Petite Mélopée se dirigea d’elle-même vers la tanière de la guérisseuse. Ce n’était pas la première fois qu’elle y passait. On ne comptait même plus ses visites tellement elles étaient devenues anodines. Boitillant, manquant de tomber une nouvelle fois le nez dans la terre, elle entra et observa l’intérieur. Nuage de Fleur était seule.

« Bonjour Nuaaaage … » Elle retint son souffle, sa blessure la brûlait de plus en plus. Serrant les dents, elle continua sa phrase : « de Fleur … »

Elle s’assit non loin de l’apprentie, observant l’entaille. Elle n’osait pas y toucher, craignant de faire une bêtise. Elle préférait laisser quelqu’un d’expérimenté s’en occuper. Et quand la novice vint la rejoindre, elle lui contât sa mésaventure.

« Je suis tombée, encore. Mais cette fois-ci, je suis tombée sur une pierre pointue et puis … Bah voilà le résultat. » Dit-elle en montrant la coupure.

« Et rebelote ... »

Mélopée & Fleur

La novice au pelage flamboyant s’approcha pour écouter. A la fin du récit, elle s’approcha un peu plus du chaton afin d’observer sa blessure de plus près. Après réflexion, Nuage de Fleur miaula doucement à Petite Mélopée :

« Bon, à première vue, ta blessure ne m'a pas l'air si grave. Elle n'est pas infectée, tu t'es juste méchamment tailladée la patte. Ce n'est pas bien grave. Tu ne bouges pas, je vais chercher de quoi te soigner. »

Le chaton hocha la tête. De toute manière, elle n’avait pas l’intention de bouger, ça faisait bien trop mal pour tenter de faire ne serait-ce qu’un pas. Elle grimaça en voyant que quelques cailloux s’étaient incrustés dans sa peau. Plongée dans ses réflexions, elle ne vit pas l’apprentie s’approcher de nouveau. Mais l’odeur d’une plante la fit revenir à elle. Il y avait des toiles d’araignées et … Des feuilles. Aucune idée de ce que c’était.
L’apprentie-guérisseuse appliqua les premiers soins. Petite Mélopée serra les dents de plus belle. C’était vraiment douloureux, cette brûlure qui la lançait. Mais elle ne dit rien. Je vous l’ai déjà dit, elle n’était pas du genre à se plaindre. Mais cette sensation la rendit sourde aux paroles de sa nouvelle amie.
Le sang continuait de couler, formant de petites tâches sur le sol rocailleux. Un sifflement aigüe, perçant, bourdonna dans ses oreilles. Ce mal s’accentuait et sa patte s’engourdissait. La tête lui tournait. Elle finit par gémir d’une toute petite voix, trop faible pour paraitre paniquée :

« Pourquoi ça ne s’arrête pas ? J’ai mal … »

Les petits gravillons semblaient lui déchirer de plus en plus la patte, alors que ce n’était pas le cas. Et si ça s’infectait ? Et si elle ne pouvait plus marcher que sur trois pattes ?

« Et rebelote ... »

Mélopée & Fleur

« Ne t'en fais pas Petite Mélopée, le saignement finira par s'arrêter, je te le promets. »

Le chaton tentât de se calmer, de prendre les paroles rassurante de l’apprentie au sérieux. Mais l’odeur du sang, de son propre sang, l’empêcha de reprendre clairement ses esprits. Cette odeur, elle ne l’aimait guère.

« Le débit commence à baisser, Petite Mélopée, c'est bientôt finit. Par contre, j'aurais besoin de ta patte. Il faut que tu appuies sur la toile le temps que j'aille en rechercher. »

Elle hocha la tête à ses paroles, même si elle ne s’était pas complétement détendue. Avec son autre patte, elle retint les toiles d’araignées imbibées de sang. Il n’y avait plus qu’à attendre le retour de la novice.
A peine Nuage de Fleur fût-elle partie que Petite Mélopée ressentit une présence à ces côtés. Une présence chaleureuse qu’elle connaissait bien. Dans chaque moment dur, le parfum de sa mère l’accompagnait. Alors elle s’apaisa. Elle savait que tout aller bien se passer désormais.
La rouquine revint vers elle, et c’était avec un sourire beaucoup moins crispé que la boule de poil grise l’accueillit. Même si sa patte lui faisait toujours mal, la confiance qu’elle vouait à la femelle rousse n’avait presque aucune limite.